Jamais, me semble-t-il, l’homme n’a tant rêvé,
Libre dans ses pouvoirs, et pourtant accablé.
Entre ses mains, des clés pour briser les frontières,
Franchir l’espace immense, effacer la lumière.

Mais ses cœurs, enchaînés, frissonnent devant l’ombre,
L’infini qu’ils tracent demeure froid et sombre.
L’avenir, autrefois promesse et clarté,
Devient un labyrinthe sans fin, ni vérité.

Je sens une angoisse au-delà de mon être,
Un fardeau partagé que nul n’ose admettre.
Les conflits incessants, les béantes inégalités,
Et les réseaux criards qui brisent les unités,

Me rappellent amèrement que nos arts et nos armes,
Ne peuvent élever l’âme, malgré leur vacarme.
L’homme moderne erre, perdu, déséquilibré,
Happé par un présent sans répit ni clarté.

Quelle est cette soif folle, ce besoin de vitesse,
Qui dévore nos jours dans un souffle sans cesse ?
Cette quête effrénée d’un monde si vorace,
Dissout l’humain fragile en un rêve peu fugace.

La pensée mûrie meurt, balayée sans retour,
Par l’instant qui s’impose, brutal, sans détour.
Dans cette frénésie de tout voir, de tout prendre,
Avons-nous oublié comment savoir attendre ?

Pourtant, je ne veux point céder à cette peur,
Laisser l’angoisse écrire les mots de ma ferveur.
Je crois encore aux forces des silences féconds,
Aux idées qui jaillissent des calmes horizons.

L’histoire, bien souvent, fut cruelle et funeste,
Mais l’homme se relève, sa flamme jamais reste.
Dans ce tumulte immense, un sursaut peut surgir,
L’humanité, toujours, saura se ressaisir. 

Richard C. ABITBOL